Autopsie d’un papillon (Jean-Noël Sciarini)

Autopsie d’un papillon (Jean-Noël Sciarini)

Résumé de l’éditeur

Mark est une graine de champion de la natation française. À tel point que son père a tout organisé : à la rentrée, l’adolescent intègre une filière sport-études à Paris, toute la famille quitte le village où elle vivait jusque-là. Mark découvre ainsi son nouveau coach et une nouvelle classe où se côtoient nageurs et coureurs. Il tombe rapidement sous le charme de la fascinante Marie, spécialiste du marathon.

Dans l’immense capitale, Mark se socialise doucement, goûte à ses premières sorties, jusqu’au fameux soir où une barrière invisible l’arrête net : impossible de grimper au sommet du Sacré-Cœur avec ses amis. Peu à peu une véritable cartographie de Paris s’imprime dans son corps et sa tête ; il se sent mal aussitôt qu’il essaie de la dépasser.

Quelques recherches plus tard, Mark comprend qu’il souffre d’agoraphobie. C’est le début d’une remise en question. La vérité menace sa relation avec Marie et, s’il aime toujours nager, Mark réalise que la compétition ne l’intéresse pas. Autant de doutes qu’il faudra écarter pour accéder au bonheur.

À travers le destin de ce personnage fragile, Jean-Noël Sciarini nous propose une réflexion intime sur l’acceptation de soi, un roman au propos dense conduit par une écriture délicate.

 

Mon avis

Mark déménage à Paris dans un lycée sportif pour accroître ses performances en nage papillon, selon la volonté de ses parents. Au début, tout se passe bien, puis, d’un seul coup, le jeune espoir adolescent se trouve fauché en plein vol par une crise d’angoisse qu’il n’identifie pas comme telle. À partir de là, il tente de cacher « son mal » à ses parents et sa nouvelle amoureuse, déterminant petit à petit autour de lui un périmètre de confort et de « sécurité » qui s’amenuise de jour en jour.

J’ai bien aimé ce roman, même si je trouvais qu’il tirait un peu en longueur à certains moments. La première partie où Mark est victime de ses crises d’angoisse dure assez longtemps et le personnage s’enferme dans son secret, ce qui est un peu agaçant. J’avais envie de le secouer et de lui dire : « Parle, enfin ! ». En même temps, c’est un comportement qui me paraît typiquement adolescent, de même que son problème à s’accepter tel qu’il est, ou plutôt à accepter ce que ses parents veulent faire de lui.

De fait, ils décident tout dans la vie de leur fils sans lui demander son avis, avec cette philosophie parfois dangereuse, formulée en termes courants « C’est pour ton bien ». Oui, mais quel bien ? C’est plus subtil que ça et on le comprend bien. Mark est un ado perdu, un peu trop livré à lui-même, habitué à se défoncer dans le sport, mais désarmé lorsqu’il faut oser être soi-même et mettre des mots sur son ressenti. C’est un personnage attachant, pétri d’un magma d’émotions bouillonnantes. On se tracasse pour lui, on voudrait l’aider à grimper jusqu’à la dernière marche du Sacré Cœur, pour lui dire que c’est possible, qu’il ne doit pas laisser ses peurs lui dicter sa vie.

« Pourquoi ne pas m’avoir dit tout de suite que vous souffrez d’agoraphobie ? Je réfléchis longuement, bien que j’eusse déjà la réponse.

– Peut-être est-ce parce que je préfère me raconter des histoires plutôt que d’affronter la réalité ? Tout, plutôt que de reconnaître que je suis malade. Je suis tellement effrayé à l’idée que l’on me colle cette étiquette pour le restant de ma vie, et que je ne puisse plus jamais m’en défaire. Tellement terrifié à l’idée que l’on me rejette et m’abandonne… Tellement peur aussi de me retrouver enfermé dans un hôpital en compagnie des fous. Je ne sais même pas s’il existe un endroit où l’on pourra me rapatrier, où je pourrai retrouver les miens ?… Ici, à Paris ? Je crois que cette ville n’est définitivement pas faite pour moi. Et la réciproque vaut aussi… Je lui ai posé bien trop de lapins, et mille vies ne suffiraient pas pour qu’elle puisse me pardonner… »

 

Le +

  • L’agoraphobie est un thème peu abordé en littérature de jeunesse et elle est explorée dans ses aspects les plus importants (malaises, incompréhension, isolement, difficultés dans la vie sociale).
  • La solitude dans laquelle s’est enfermé Mark le rend attachant et fragile.
  • Le contraste entre les performances physiques de Mark et sa fragilité psychique en font un personnage intéressant.

 

Le –

  • La mise en place des crises d’agoraphobie, sans explication sur la maladie, dure longtemps et les détails sombres peuvent rebuter le lecteur.
  • Mark est fort entravé par ses peurs et son manque de confiance en soi, on se dit à plusieurs reprises qu’il n’y arrivera pas.
  • L’entêtement du père à vouloir forcer son fils à faire une carrière dans la compétition sportive est agaçant.

 

Le coin des profs

  • Les 3 points négatifs que je viens de citer peuvent prêter à débat.
  • Le roman ne présente pas de difficulté de lecture. Il est un peu épais, un lecteur novice pourrait être découragé par le nombre de pages.
  • L’univers psychique de Mark est un peu sombre. Certains jeunes lecteurs peuvent y trouver un écho quelque peu mortifère.

 

Infos pratiques

  • À partir de 15 ans
  • La joie de lire
  • 336p.
  • 16,50€
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