Elia, la passeuse d’âmes. Tome 2 (Marie Vareille)
Résumé de l’éditeur
Quand elle entre avec Solstan au Conclusar, le centre de détention pour mineurs du Palatium, Elia n’a qu’un objectif : retrouver sa sœur. Mais elle est loin d’imaginer les dangers qui l’attendent derrière ces murs de béton, où le secret de ses origines ne doit être découvert à aucun prix ! Dans un monde impitoyable où l’ennemi n’est pas toujours celui qu’on croit, Elia survivra-t-elle ? Elia, Solstan, Tim et Arhia sauront-ils défendre leurs idéaux jusqu’au bout, quel que soit le prix à payer ?
Mon avis
J’avais beaucoup d’attentes pour ce tome 2 et je n’ai pas été déçue : le suspense était au rendez-vous ! J’avais toutefois une petite crainte, c’est d’avoir oublié des détails importants du tome 1 lus l’année dernière, mais c’était sans compter sur le talent de l’auteure qui a rappelé les points importants de l’intrigue et des personnages avec un certain naturel (leur rappel n’était pas forcé).
Dans ce tome 2, nous retrouvons Elia qui est parvenue à intégrer le Conclusar après avoir bénéficié d’un entraînement intensif auprès de Solstan. Celui-ci décide de s’enrôler pour la soutenir et l’aider à protéger Edeline, la sœur d’Elia enfermée à sa place.
Le Conclusar est un endroit horrible, une sorte de camp de concentration dont on ne revient jamais, où les recrues se font intégrer près du cœur une puce qui peut les tuer sur la simple pression d’un bouton (en cas de désobéissance, évidemment). Ils suivent un entraînement draconien pour devenir les Défenseurs du Palatium et sont dépouillés de toute leur humanité : on les sépare et on les punit quotidiennement en les torturant. Leur vie ne tient qu’à un fil, surtout pour les enfants.
J’avoue que dans ces premiers chapitres, j’ai eu le ventre noué et je me suis demandé si l’autrice allait plonger ses héros dans la noirceur la plus totale sans jamais les en sortir. Heureusement, ce qui nous fait un peu souffler, c’est l’alternance du point de vue des différents personnages. En effet, durant plus d’une centaine de pages, Elia va être maintenue captive, ce qui va laisser de la place aux personnages secondaires pour être développés : on découvre alors la vie dure de Tim, assez effacé dans le tome 1, qui est obligé de consommer de la Redmoon pour tenir le coup car sa maman vient de tomber malade et ne peut plus travailler. Ses conditions de vie deviennent particulièrement difficiles.
Heureusement, grâce à un concours de circonstances, il va faire la rencontre d’Alek, Salika et les Combattants de l’Aube, un groupe de rebelles déterminés à renverser le système. Les chapitres avec Tim ont suscité mon intérêt : j’étais vraiment curieuse de découvrir ces résistants, leurs desseins, leurs interventions ou encore leur façon de procéder pour préparer la révolution. Ils doivent cependant agir cachés et sont très soupçonneux vis-à-vis des autres. On se demande jusqu’au bout qui s’investit réellement dans la cause, qui tire les ficelles dans l’ombre et on a des surprises à la fin du récit !
On approfondit aussi dans ce tome la personnalité de Solstan, on suit Arhia et on découvre un nouveau, Alek. Ces changements de personnages nous font changer de point de vue, de décor, d’enjeu ; ils créent du suspense et donnent du rythme au récit car on saute d’une péripétie d’un personnage à celle d’un autre. Bref, le lecteur n’a aucun répit !
Le dernier tiers du récit est très dynamique et bourré de suspense avec tous les retournements de situation. Autant certains rebondissements étaient prévisibles, autant je ne m’attendais pas du tout à certaines révélations. Cette suite est bien plus sombre que le premier opus. Au fil des pages, on réalise à quel point la situation est plus complexe et obscure qu’elle n’y paraît. Certes, on retrouve l’idée de révolte contre un système abusif, comme dans toutes dystopies, mais Marie Vareille tire son épingle du jeu en revisitant la notion de prophétie et en proposant un enchaînement d’actions qui donnent le vertige.
J’ai beaucoup aimé le questionnement des personnages : Elia, Sol, Tim, Anouk et Salika vont devoir réfléchir à leur but final et se demander s’ils sont prêts à tous les sacrifices pour y parvenir. Jusqu’où sont-ils capables d’aller pour sauver leurs proches ? Sont-ils prêts à mourir pour la communauté et la liberté de tous ? Les revendications des Combattants de l’Aube sont-elles légitimes et si oui, Elia, qui est toujours l’emblème de la prophétie par sa couleur de cheveux, a-t-elle vraiment un rôle à jouer dans tout cela ? Doit-elle tout accepter sans réfléchir ?
« – On peut se battre sans faire la guerre. Il existe d’autres armes que les pistolets modulaires, les coups et les sabres, enfant. Elia réalisa soudain qu’il s’était remis à neiger.
– Lesquelles ? demanda-t-elle.
Noriaxis se pencha en avant, son sourire laissa entrevoir ses gencives édentées.
– Les mots. Les mots ont un pouvoir que personne ne soupçonne. Pourquoi crois-tu qu’on avait brûlé tous les livres de l’ancienne civilisation ?
[…]
Tu as derrière ces jolis yeux gris une chose fort utile qu’on appelle un cerveau, grommela-t-elle, je suggère que tu l’utilises pour réfléchir par toi-même. Sache toutefois que l’histoire a démontré que la violence engendre toujours la violence et qu’on obtient rarement la paix en déclarant la guerre. »
La question de la loyauté est aussi soulevée par plusieurs personnages : loyauté à la cause, à la caste, à la famille et aux amis. Ce questionnement donne de la densité au récit : les personnages murissent et le lecteur les suit.
Sont également évoqués les dangers de la drogue avec Tim, qui est obligé de descendre de plus en plus bas dans la mine, qui n’arrive plus à faire face au chagrin de tous ceux qu’il a perdus et qui cède à l’appel de la Redmoon. Bien d’autres sujets sont abordés tels que la maladie, le deuil, les apparences trompeuses, la souffrance morale qui est telle qu’on ne vit plus que comme une machine. Il y a aussi la réflexion pertinente sur un sujet très important à mes yeux : la désinformation. Ce que l’on nous montre aux journaux télévisés, est-ce véritablement ce qu’il s’est passé ? Ne faut-il pas prendre du recul, lire entre les lignes et comparer les différentes sources ?
Les derniers chapitres s’enchaînent dans une série d’actions et de rebondissements qui ne nous laissent aucun répit et se terminent avec une scène finale qui nous donne furieusement envie de lire le tome 3 !
Le +
- Ma crainte que la prophétie ne prenne trop de place dans le récit s’est envolée. Vous comprendrez en lisant. Une bonne chose !
- Elia est très attachante, mais c’est quelqu’un d’impulsif qui commence enfin à remettre en question son comportement et ses conséquences sur les autres (« Qu’avait-elle fait ? Tous ceux qui l’approchaient finissaient mal. Tous les gens qu’elle aimait souffraient à cause d’elle. »).
- C’était intéressant de voir se développer petit à petit la personnalité de personnages secondaires comme Tim.
Le –
- Dans les scènes de combat, les adversaires sont vite vaincus. Un peu facile.
- Dans le récit, Alek a une histoire d’amour un peu cliché avec un personnage secondaire.
- Solstan est fou amoureux d’Elia et la suit partout au péril de sa vie. J’avais parfois envie de le secouer comme un prunier : à un moment, il faut sauver sa peau, l’amour n’est pas possible quand on est mort.
- L’univers présenté est plus dense que dans le 1er, mais il reste assez manichéen : il y a les bons d’un côté et les méchants de l’autre. J’aurais bien voulu sentir davantage l’ambivalence propre à l’être humain.
Le coin des profs
- Le récit ne présente aucune difficulté de lecture et peut vraiment plaire à un large public avec les scènes d’action, l’univers de la SF ou les réflexions en filigrane évoquées plus haut.
- La lecture de la saga peut ouvrir sur des débats intéressants sur les addictions, la rébellion face au totalitarisme, la manipulation des médias, la question de la loyauté,…
Mots clés
Addiction, amour, amitié, camp de concentration, guerre, révolution, totalitarisme
Vous aimerez ce récit si vous avez aimé…
Divergente, Veronica Roth
Infos pratiques
- Pocket jeunesse
- 412p.
- 19,40€